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jeudi, 20 mars 2008

La « fracture numérique » fait débat…

En effet, il m’a été reproché de sous-estimer le fait que des milliers de personnes en France ne peuvent accéder à internet, ne disposent ni d’ordinateur, ni de connexion. Bien entendu, c’est vrai. Et tout ce qui permettra de surmonter ces freins à l’accès est indispensable. Mais ce que j’ai voulu souligner, c’est le risque de se limiter à une approche par l’accès physique (que l’obstacle soit financier, générationnel ou géographique).


Pour prendre une image, à quoi cela sert-il d’installer des bibliothèques dans les quartiers, si les enfants sont en échec scolaire ? On peut bien sûr penser que l’existence de bibliothèques va contribuer à une appropriation de la lecture, à lutter contre l’échec scolaire. Mais nous savons que si cela fonctionne, c’est à la marge. Pour l’essentiel, ce sont les enfants déjà en maîtrise de la lecture qui profiteront des bibliothèques et de la facilité d’accès offerte. Alors, oui il faut construire des bibliothèques, mais ce travail sera d’autant plus payant que l’école jouera pleinement son rôle.

C’est aussi vrai pour les TIC. Les penser en soi est vain. Les penser comme un atout pour accompagner des politiques sociales ou de formation, alors oui, elles peuvent jouer un rôle nouveau et considérable. N’a-t-on pas constaté que les logiciels de bureautique ne sont utilisés qu’entre 15 et 20% de leurs capacités en moyenne ? Pourquoi ? Les personnes utilisatrices ont pourtant « l’outil » à disposition. Mais on se rend compte que souvent, elles n’ont pas besoin des fonctionnalités avancées dans la représentation qu’elles se font de leur travail. La « fracture » est à qualifier comment dans ce cas ?

Je souhaitais, par cette approche un peu caricaturée, alerter sur un risque : celui de considérer que l’accès aux technologies créerait de fait de l'égalité, alors qu’au contraire, il risque paradoxalement d’amplifier les inégalités. Et je ne peux m’empêcher de mettre en rapport certains discours sur les savoirs minimum nécessaires : lire, écrire, compter et posséder le certificat informatique. Mais dans le même temps, le pouvoir sera encore du côté de ceux qui lisent Sophocle et font l’ENA. Et on a besoin du « certificat d’études informatiques » pour former de bons ouvriers.

En disant cela, je mesure la contradiction du propos. Les outils sont aussi de formidables vecteurs d’émancipation possible dans le travail. Une condition nécessaire pas suffisante. Une porte d’entrée à condition de bien voir qu’elle ne peut se suffire à elle-même.

Cela d’autant plus que les outils sont très loin d’être neutres sur les rapports sociaux, et ils modifient aussi l’organisation du travail en profondeur.

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